CONTRE LA GUERRE, COMPRENDRE ET AGIR
Bulletin n°197– semaine 33 – 2008
Nouvelle attaque de l’internationale noire
après le « latino » URIBE,
l’internationale noire a mandaté le « caucasien »
SAAKASHVILI pour franchir une nouvelle étape dans la préparation
du grand assaut contre le bloc « eurasiatique » constitué
autour de la Russie et de la Chine.
La question ossète est bien connue de tous les diplomates.
Dans la mosaïque ethnique caucasienne, elle occupe une place particulière
en ce sens que le peuple ossète – unifié autour d’une
langue voisine du persan et qui n’a rien de commun avec le géorgien,
majoritairement de confession orthodoxe contrairement aux géorgiens chrétiens
« indépendants » - est installé des deux
côtés de la barrière caucasienne et il est le seul groupe
caucasien dans ce cas.
Tant que l’Ossétie du Nord et l’Ossétie du Sud n’étaient
que deux divisions administratives de l’URSS, les Ossètes ne se
sentaient pas étrangers les uns aux autres. La disparition de l’URSS
les a séparés politiquement, l’Ossétie du Nord devenant
une république de la fédération de Russie et l’Ossétie
du Sud se voyant ravalée au rang de région de la Géorgie
indépendante. Comme les Ossètes du Sud n’acceptaient pas
ce nouveau statut, le premier chef d’Etat de la nouvelle Géorgie,
GAMSAKHOURDIA, a voulu régler le problème par la force. Ce fut
donc la première guerre d’Ossétie, guerre de type ethnique
donc civilement désastreuse puisqu' elle suscite de la haine entre
concitoyens. La mort du président géorgien et son remplacement
par l’ex-ministre soviétique CHEVARDNADZE permit de rétablir
le calme. Un accord de cesser le feu fut donc conclu entre lui et BORIS ELTSINE.
qu' à l’époque ces deux dirigeants n’aient pas
trouvé une réponse durable à la question ossète
– mais ils avaient d’autres préoccupations immédiates
dans la grande débâcle soviétique – n’enlève
rien au fait qu' ils ont assuré le calme pendant 16 ans.
C’est donc au nom d’un accord russo-géorgien entre Etats
souverains qu' a été constituée une Commission mixte
de coordination et que sont présents en Ossétie du Sud des soldats
russes de maintien de la paix et que l’Ossétie du Sud indépendante
de facto mais non reconnue par la communauté internationale a vécu
tranquille jusqu' à l’arrivée au pouvoir à Tbilissi
de MIKHAIL SAAKASHVILI.
Celui-ci a feint d’ignorer que l’accord russo-géorgien de
1992 engageait son pays à trouver une solution politique à la
question Ossète et à garantir la paix.
Certes POUTINE n’est pas ELTSINE mais en droit international
un accord entre Etats s’il n’est dénoncé officiellement
reste en vigueur même si les dirigeants changent.
Il est notoire que la Russie a respecté ses engagements y compris ceux
de fermer dans les délais fixés les bases militaires qu' elle
avait encore en Géorgie, simples restes de l’ère soviétique.
L’agression géorgienne du 8 Aout est donc une
violation consciente et organisée d’un accord international, aspect
délibérément ignoré par les 3 « occidentaux »
du Conseil de Sécurité » et à leur suite par
tout l’orchestre médiatique de la soi-disant « communauté
internationale » dans son tintamarre mensonger. Ce contrat si brutalement
déchiré est dans l’esprit des agresseurs destiné
à permettre le remplacement des soldats russes de maintien de la paix
par des Casques Bleus qui seraient, on s’en doute, gracieusement mis à
disposition par les ennemis intimes de la Russie : polonais, ukrainiens,
estoniens... le choix est large !
Cette agression est tout sauf une improvisation ou un coup
de chaleur d’un dirigeant énervé. Que ce personnage ait,
depuis sa prise de pouvoir, manifesté un activisme pro-occidental forcené
n’est pas pour surprendre. Il avait été choisi pour ça.
Pour mieux le décrire, nous avons choisi de donner la parole à
SALOME ZOURABICHVILI qui a été son ministre des Affaires étrangères
en reproduisant in fine une partie d’un article publié le mois
dernier par la revue de géopolitique HERODOTE.
Le programme fixé par l’Internationale Capitaliste
réactionnaire, l’Internationale Noire (Etats-Unis, Israel, et aujourd’hui
France et Union Européenne) à la Géorgie nouvelle est simple :
être une écharde empoisonnée plantée dans la chair
russe en servant de base arrière à tous les dissidents antirusses
du Caucase Nord (Tchétchénie, Daghestan), récupérer
par tous moyens les trois provinces géorgiennes indépendantes
de fait ( Adjarie - ce qui a été fait - Ossétie du sud,
et Abkhazie*) et faire rentrer la Géorgie dans l’OTAN pour achever
l’encerclement de la Russie cette fois par le Sud. C’est la vieille
stratégie du ROLL-BACK anti- communiste telle que la pratiquait déjà
JOHN FOSTER DULLES. La haine de la Russie a simplement remplacé la haine
du bolchévisme, l’ambition géostratégique impériale
demeure. Que la politique intérieure ne produise aucune amélioration
dans les conditions de vie du peuple géorgien, ce dont se plaint SALOME
ZOURABICHVILI est le cadet des soucis et de SAAKASHVILI et de ses sponsors.
Bien que la popularité de SAAKASHVILI soit en recul
ou peut-être parce qu' elle est en recul et que les objectifs de
l’Internationale Noire doivent à n’importe quel prix être
atteints avant qu' il ne soit chassé du pouvoir par une opposition
encore divisée mais réelle, la Géorgie va multiplier début
2008 les incidents frontaliers les attaques et les survols menaçants
du territoire sud-ossète. La capitale de l’Ossétie du Sud,
TSKHINVALI n’est qu' à 5 km de la frontière et un canon
bien orienté peut faire des dégâts !
BUSH n’ayant plus que quelques mois pour entamer une
nouvelle guerre et la laisser en héritage à son successeur, les
préparatifs se sont donc accéléré. En outre la menace
(fausse jusqu' à présent car les militaires US refuseront
de s’engager dans un conflit énorme qu' ils pourraient perdre
) d’un affrontement militaire direct Russie Etats-Unis est probablement
la meilleure façon d’assurer la victoire de Mac Cain aux présidentielles
Le budget militaire de la Géorgie a cru vertigineusement (+ 60 % en un
an) les conseillers militaires et les mercenaires étasuniens ont vu leur
nombre croitre, la France après avoir sous Chirac participé
à la formation des troupes de montagne géorgienne a ,sous Sarkozy,
assuré celle des garde-côtes, Israel a pris toute sa place dans
l’opération. Le rôle joué par Israêl mérite
d’être précisé : depuis 7 ans, Israel, grand
exportateur d’armes en général est devenu un fournisseur
régulier de la Géorgie, a assuré la formation de la nouvelle
armée georgienne et le ministre de la défense géorgien
, DAVID KEZERASVILI, est un ancien citoyen israélien tout comme son collègue
TEMUR YAKOBASHVILI.
L’attaque militaire massive de l’Ossétie du sud aurait plu
avoir lieu n’importe quand. Mais le choix du 8 Août montre qu' il
s’agit d’une opération mûrement réfléchie
et organisée au plus haut niveau de l’Internationale Noire.
Elle a eu lieu après que le 7 Août au soir SAAKASHVILI
ait annoncé à la télévision géorgienne qu' il
avait ordonné l’arrêt des attaques sporadiques de l’armée
géorgienne sur l’Ossétie du Sud. A cette occasion SAAKASHVILI
a rejoint le Colombien URIBE au tableau d’honneur des fourbes et des félons
de l’Internationale Noire.
Elle a eu lieu à l’heure où de nombreux
chefs d’Etat ou de gouvernements assistaient à la Cérémonie
d’ouverture des JO à Pékin. C’était le cas,
en particulier, de Bush de Poutine et de Sarkozy.
Examinons ces trois cas :
pour BUSH, l’opération est décidée bien avant son
départ des Etats-Unis et sa tranquillité résulte du fait
que l’exécution de la tâche relève ce 8 Aout d’une
part des échelons inférieurs et secrets de son gouvernement d’autre
part, pour la façade, du fait qu' il s’agit d’une « initiative
purement géorgienne »,
pour Poutine, sa présence à Pékin l’empêche
de prendre depuis la tribune du stade olympique les mesures de riposte nécessaires
dont la responsabilité va échoir à DIMITRI MEDVEDEV et
il s’agit donc d’un test de l’Occident pour savoir si le nouveau
Président est moins ferme que son prédécesseur face à
l’encerclement occidental. Cette question a reçu très vite
une réponse claire, la faille espérée par l’Internationale
Noire entre MEDVEDEV et POUTINE n’existe pas
pour SARKOZY, qui est dans le secret soit via Washington soit via Tel Aviv (soit
les deux), - lire à ce sujet la biographie du personnage récemment
publiée par le Réseau Voltaire que nous joignons à ce bulletin,
il importe de rester le moins longtemps possible à Pékin :
assez pour être vu sur les écrans ce qui est son souci premier
et permanent , assez peu pour être de retour au plus vite à Paris
à la tête de l’Union Européenne dans ce face à
face guerrier avec la Russie et de pouvoir courir partout et pérorer
comme il aime à le faire . Voilà soudain l’impresario d’une
chanteuse sans voix qui se retrouve au cœur d’une tourmente internationale
de grande ampleur.
Quelques enseignements peuvent être déjà
tirés :
1 – la Russie qui avait annoncé – discours de Poutine à
Munich en Février 2006 – qu' elle en avait assez des activités
occidentales antirusses est passée de la parole au geste fort elle l’a
fait d’autant plus facilement du fait que l’agresseur est la Géorgie
et que c’est la Géorgie qui a rompu unilatéralement l’accord
de paix de 1992. Les membres de l’Internationale noire qui voulaient savoir
jusqu' à quel niveau de provocation il était possible de
monter sans que la Russie ne riposte efficacement disposent aujourd’hui
d’une réponse. Le seuil est franchi et la Russie a riposté.
Ce test a couté la vie à quelques milliers d’Ossètes
et détruit toute une province mais cela compte pour rien dans la pensée
des stratèges de l’Internationale Noire.
2 – la France se retrouve en première ligne dans
un face à face dangereux avec une Russie qui ne capitulera pas alors
que les tireurs de ficelle de Washington peuvent se contenter de déverser
des flots de propagande où se mélangent la haine du russe, la
haine du communiste et la haine de tous ceux qui s’opposent et faire avancer
leur objectif de faire de l’Eurasie un champ de bataille généralisé
où le minuscule Ouest, celui dont la France se croit le maitre, se confronte
au bloc massif Russie-Chine–Asie Centrale pour le plus grand profit du
capital étasunien.
3 – l’Union Européenne, même si elle
réussit à sauver les apparences va se diviser plus que jamais
entre les va-t-en guerre Sarkoziens, Otaniens et antirusses farouches et les
réalistes qui ont l’intelligence de comprendre que les intérêts
des Etats-Unis ne sont pas les mêmes que ceux de l’Europe et qu' il
va falloir très vite calmer SAAKASHVILI.
Les pronostics sont difficiles : en effet l’approfondissement
incessant de la crise économique amorcée en Aout 2007 peut favoriser
la fuite dans la guerre. Rien n’indique pour l’instant que le gouvernement
français refuse cette hypothèse. Nous verrons bientôt si
la France est devenue une colonie des Etats-Unis.
*pour l’Abkahzie la situation diplomatique est plus complexe
puisque la fragile paix y est garantie par une mission de l’ONU. Les soldats
russes basés en Abkhazie sont donc des casques bleus. Difficile de les
faire bombarder !
Paru dans le numéro 129 - 2° trimestre 2008 -
d’ HERODOTE revue de géographie et de géopolitique
La Révolution des roses dans l’impasse
Entretien avec Salomé Zourabichvilii
Bons Petric. Avant
de devenir une actrice de premier plan de la vie politique géorgienne,
vous avez été une observatrice privilégiée de la
« transition » de cette ancienne République soviétique
en tant qu‘ambassadrice de France. Pourriez-vous rapidement caractériser
le fonctionnement de la vie politique sous Chevardnadze?
Salomé Zourabichvilii. La
vie politique sous Chevardnadze est une continuation du système Chevardnadze
de la période soviétique avec une rupture : l’indépendance.
Malgré l’indépendance, dans la réalité, ce
système est marqué par le totalitarisme précédent.
C’est une démocratie de façade dominée par un parti
unique, celui du président. Les contre-pouvoirs nécessaires à
l’exercice démocratique, comme la presse et les ONG, la justice,
ne s’affirment que dans un lent processus et s’autonomisent progressivement
grâce au soutien américain qui a été très
important pendant cette période.
Lorsque nous arrivons en novembre 2003, le régime est à bout de
souffle. Il se trouve confronté à une crise de tous ordres aussi
bien économique, social... Il n’y pas d’Etat de droit, et
finalement la Géorgie n’est pas sortie du modèle postsoviétique
dans lequel des clans dominent les affaires, le népotisme est le mode
de gouvernance. De plus, les liens avec Moscou restent présents, mais
la Géorgie dispose d’une indépendance étatique même
si elle est sous pression, son indépendance est indiscutée...
B. P. Ce petit
État compte cinq millions d’habitants et occupe une position centrale,
partageant des frontières avec la Russie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan
et la Turquie, non loin de la Syrie, de l’Irak et de l’Iran. Elle
a immédiatement attisé les convoitises et la Géorgie a
reçu une importante aide internationale, en particulier de l’Europe
et des Etats-Unis, en matière de démocratisation. Avez-vous le
sentiment que l’assistance à la démocratisation a joué
un rôle important dans la démocratisation du pays?
S. Z. Indiscutablement
l’aide internationale et l’aide américaine en particulier
ont contribué à démocratiser le pays... Tout un ensemble
de programmes et d’actions a permis la naissance d’ONG, mais ils
ont aussi contribué à la formation de jeunes juristes, de journalistes,
c’est-à-dire tout un ensemble d’acteurs qui font le tissu
démocratique d’un pays... il faut reconnaître l’importance
de l’aide américaine sans pour autant la surévaluer comme
certains ont tenté de le faire en présentant la révolution
comme une fabrication américaine.
La vérité est entre les deux, mais il est clair que les Américains
ont joué un rôle important. Le rôle européen est peu
affirmé jusqu' en 2003 et la politique européenne peu orientée...
C’est à partir du moment où la Géorgie entre dans
la «politique de voisinage» de l’UE que tout change et là
l’Europe participe aux processus de démocratisation de la Géorgie.
L’UE décide de soutenir particulièrement le concept d’Etat
de droit et apporte son aide aux institutions dans la perspective de contribuer
à l’émergence d’un droit géorgien. Des programmes
participent à la conception d’un système d’un point
de vue théorique et ensuite pratique... Force est de constater qu' après
quatre ans de coopération le côté pratique n’a pas
marché car, si on en vient maintenant à la situation actuelle
en Géorgie, le système de droit est en panne.
B. P. Chevardnadze
a immédiatement mis au centre de sa politique étrangère
une coopération étroite avec les instances internationales, les
puissances occidentales notamment, pour lancer la démocratisation de
son pays. Au-delà d’une rhétorique politique, le déploiement
du soft power américain s ‘est traduit par un développement
très important d’ONG en Géorgie. Pensez-vous que cette action
a permis la naissance de nouveaux acteurs dans la société géorgienne?
Si oui, lesquels ?
S. Z. La première
vague du soutien américain à la société géorgienne
a été très importante pour renforcer la société
géorgienne avec un tissu d’ONG, mais aussi des associations professionnelles.
Il faut notamment souligner l’importance de l’association des juristes,
qui est devenue un véritable lieu de pouvoir. Il a joué au moment
de la Révolution des roses un rôle de fer de lance dans la démocratisation
du pays... Si cette aide a eu des effets incontestables, nous devons malheureusement
constater que ces nouveaux acteurs n’ont pas pour autant fait changer
le système. Le système Saakachvilii retombe exactement dans les
mêmes ornières que celui de Chevardnadze consistant à une
accaparation sans partage du pouvoir par un petit groupe. C’est le groupe
d’un parti, d’un président... On a donc un paradoxe, une
société réellement en train de se démocratiser,
avec des aspirations de plus en plus affirmées, et un système
de pouvoir qui reste non démocratique car il lui manque l’essentiel,
c’est-à-dire des contre-pouvoirs.
B. P. Pouvez-vous
nous parler en particulier du fonctionnement et du rôle de la fondation
Soros et de l’institut des libertés en Géorgie?
S. Z. Ces institutions
ont été le berceau de la démocratisation, notamment la
fondation Soros... toutes les ONG qui gravitaient autour de la fondation Soros
ont indéniablement porté la révolution. On ne peut pas
pour autant arrêter l’analyse à la révolution et on
voit clairement que, après, la fondation Soros et les ONG ont été
intégrées au pouvoir. Elles ont abandonné l’idée
d’être un contre-pouvoir et ont laissé la société
géorgienne encore plus démunie qu' à l’époque
Chevardnadze. Cette influence se mesure encore aujourd’hui, le ministre
de l’Education sortant venait de la fondation Soros et vient d’être
remplacé par quelqu' un qui est lui-même issu de la fondation
Soros... et ce constat est valable pour l’ensemble des ONG géorgiennes.
Si l’on prend le cas du célèbre «Institut des libertés»,
il fait partie du pouvoir, c’est même un bras du pouvoir dans la
société. Ce n’est plus quelque chose d’extérieur
au pouvoir.
C’est ainsi que l’on peut dire que le régime de Saakachvilii
devient encore plus monolithique que son prédécesseur car il n’y
a plus d’ONG auxquelles il doit se confronter... Actuellement, les ONG
indépendantes sont des ONG faibles et qui ne disposent pas de soutien
financier américain suffisamment important...
Et aujourd’hui il n’y a pas de financement concurrentiel, les fondations
européennes n’ont pas de stratégie. Il y a quelques financements,
mais rien qui permette l’émergence d’un véritable
contre-pouvoir. Cette situation pervertit encore plus le système Saakachvilii
car personne ne peut le contrebalancer sérieusement.
B. P. Comment expliquez-vous
votre rapide mise à l’écart du gouvernement Saakashvilii?
S. Z. Il y a plusieurs
raisons à cela. Dès le départ j’ai été
un corps étranger pour la nouvelle élite au pouvoir qui a été
constituée tout de suite par des éléments de l’ancienne
nomenklatura... d’ailleurs, sur la question de la circulation des élites,
c’est plus une continuation qu' une révolution.., donc la
nomenklatura a occupé le champ du pouvoir. Par exemple, ils monopolisent
les trois quarts des postes de commission au Parlement... Donc moi, une femme
européenne qui arrive avec mes valeurs et mes principes, je deviens rapidement
un corps étranger à tout cela... De plus, j’ai essayé
d’introduire des réformes au sein du ministère des Affaires
étrangères et j’ai touché inévitablement aux
intérêts économiques de certains clans... Il faut savoir
qu' à l’époque de Chevardnadze un poste d’ambassadeur
est avant tout un fief, c’est-à-dire qu' un ambassadeur achète
sa charge. Son salaire est faible mais le pouvoir l’autorise à
faire des affaires dans le pays où il est nommé... Vous comprenez
qu' introduire un recrutement par concours, faire un code des droits et
devoirs des fonctionnaires leur interdisant notamment de mener des activités
économiques... tout cela allait complètement à l’encontre
de la réalité du pouvoir... Aujourd’hui, il faut le dire,
Sakavchilii a restauré exactement le même système et les
ambassades continuent à être considérées comme des
prébendes. Un troisième facteur a joué dans mon éviction,
c’est l’orientation de la politique étrangère, j’ai
été remerciée au moment où je venais de réussir
une négociation très importante pour notre pays : le départ
des bases militaires russes... J’étais proche de conclure un règlement
des conflits en collaboration avec l’OSCE et les Américains...
Je suis donc remerciée en novembre 2005 et mon départ correspond
à un durcissement de ton à l’égard de la Russie,
à l’augmentation des tensions dans les territoires en conflit.
Au-delà de mon propre sort, on peut regretter que mon départ mette
un terme à un horizon de pacification qui est absolument nécessaire
pour l’avenir.
Tout cela s’est déroulé à l’aide de méthodes
dignes des grands procès en vigueur en 1937. Les explications officielles
ont manqué totalement d’argumentation crédible. On a préféré
parler de soupçon de corruption et d’incompétence à
mon égard... Il faut d’ailleurs remarquer que cela a déclenché
les premières manifestations critiques à l’encontre du régime
Saakachvilii.
B. P. Comment caractériseriez-vous
la jeune garde qui a pris le pouvoir autour de Saakachvilii? Comment expliquez-vous
que ces jeunes se réclamant de la démocratie en viennent aujourd’hui
à mettre en oeuvre des pratiques politiques douteuses pour se maintenir
au pouvoir?
S. Z. L’explication,
je dirais que c’est tout simplement être grisé par le pouvoir...
ce qui arrive à tout groupe qui prend le pouvoir quand il n’y a
pas de contre- pouvoir. On peut peut-être mettre cela aussi sur le compte
de la jeunesse qui tire du pouvoir une ivresse. On est dans un système
étrange, toute cette jeune génération qui travaillait au
sein de ces ONG a été intégrée au pouvoir. La principale
chaîne privée, Roustavi 2, qui a été au coeur du
changement pendant la Révolution des roses, est devenue la «chaîne
des gens qui ont gagné », elle en a d’ailleurs un temps fait
son slogan publicitaire. Toutes ces institutions dans lesquelles les Géorgiens
avaient mis tant d’espoirs ne sont plus indépendantes. Il n’y
a plus de télévision d’opposition. Le Parlement est composé
de trois quarts de députés à la solde du gouvernement...
Le système judiciaire, qui était déjà imparfait,
est en piteux état. C’est d’ailleurs probablement ce qu' il
y a de plus imparfait, malgré les efforts entrepris par l’UE. On
peut dire sans détour que le pouvoir judiciaire est dominé par
l’argent... depuis l’arrivée du système Saakachvilii,
on a assisté à une perversion du système et on peut malheureusement
dire que l’on va de plus en plus vers un régime paratotalitaire.
Commentaires de l' éditeur (Polex)
Cet entretien est un document d' anthologie. Résumons
le brièvement :
1 Française ex ambassadrice
de france en Géorgie elle devient en deux temps trois mouvement ministre
des affaires étrangères du gouvernement géorgien : tout
est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. C'est l'aide à
la démocratisation, le peuple géorgien étant de toute évidence
incapable de se démocratiser lui même. après l'ingérence
humanitaire voici l' ingérence démocratique.
2 "Des programmes (de
l' UE etc;) participent à la conception d’un système d’un
point de vue théorique et ensuite pratique... Force est de constater
qu' après quatre ans de coopération le côté
pratique n’a pas marché car, si on en vient maintenant à
la situation actuelle en Géorgie, le système de droit est en panne."
voici que l' ingérence démocratique n'atteint pas les résultats
escomptés.
" Si cette aide a eu des effets incontestables, nous devons malheureusement
constater que ces nouveaux acteurs n’ont pas pour autant fait changer
le système. Le système Saakachvilii retombe exactement dans les
mêmes ornières que celui de Chevardnadze consistant à une
accaparation sans partage du pouvoir par un petit groupe. C’est le groupe
d’un parti, d’un président... On a donc un paradoxe, une
société réellement en train de se démocratiser,
avec des aspirations de plus en plus affirmées, et un système
de pouvoir qui reste non démocratique car il lui manque l’essentiel,
c’est-à-dire des contre-pouvoirs. "
" toutes les ONG qui gravitaient autour de la fondation Soros ont indéniablement
porté la révolution. On ne peut pas pour autant arrêter
l’analyse à la révolution et on voit clairement que, après,
la fondation Soros et les ONG ont été intégrées
au pouvoir. Elles ont abandonné l’idée d’être
un contre-pouvoir et ont laissé la société géorgienne
encore plus démunie qu' à l’époque Chevardnadze."
conclusion évidente que la dame en question évite soros et compagnie
se foutent comme de leur première chemise de la démocratie.
3 La dame se plaint d' avoir été
viré en sous estimant l' essentiel "l’orientation de la politique
étrangère, j’ai été remerciée au moment
où je venais de réussir une négociation très importante
pour notre pays : le départ des bases militaires russes ". Alors
que l' objectif c'est la confrontation comme les évènements actuels
le montrent.
4 " Le système judiciaire, qui était
déjà imparfait, est en piteux état. C’est d’ailleurs
probablement ce qu' il y a de plus imparfait, malgré les efforts
entrepris par l’UE. On peut dire sans détour que le pouvoir judiciaire
est dominé par l’argent... depuis l’arrivée du système
Saakachvilii, on a assisté à une perversion du système
et on peut malheureusement dire que l’on va de plus en plus vers un régime
paratotalitaire. " Elle oublie de dire avec le soutien de la fondation
Soros et des USA pour qui la Géorgie n' est qu' un pion sur l' échiquier
de leur politique.
sommaire