LE CHOC DE CIVILISATION
On nous prépare à la guerre. Le discours du Pape
n’est pas l’erreur d’un théologien réactionnaire
égaré… Chacun sait bien comment les médias interviennent,
en général on leur signale qu' un discours va avoir lieu,
l’attaché de presse note même le passage et en général
les caméras se mettent en marche au moment indiqué… Donc
nul ne peut croire qu' il s’agit d’une interprétation
abusive d’un obscur passage sur lequel se seraient jetés les journalistes.
Un philosophe jusqu' ici bouffeur de curé vient dans le Figaro vomir
sa haine de l’islam avec des mots que l’on croirait emprunté
à ceux par lesquels le nazisme provoquait la haine du juif, il appuie
le pape…
Ce discours papal n’est que le signe de bien d’autres
propagandes qui nous sont distillées tous les jours et qui tentent de
nous présenter un occident assiégé par des barbares contre
lesquels il faut nous prémunir. Ils se pressent non seulement à
nos frontières mais ils sont dans nos murs. Nous sommes déjà
en guerre, et comme aux Etats-Unis pour la mener il faut ce qu' il faut…
On nous prépare à la guerre, la censure de plus
en plus dure qui s’exerce sur toute opinion qui remettrait en cause une
certaine image du monde, c’est un véritable conditionnement, il
ne s’agit pas en effet simplement de mensonges mais bien d’un conditionnement
des esprits. Mon intérêt pour Cuba m’avait alertée,
il fallait que dès que le nom de Fidel Castro soit prononcé aussitôt
l’épithète dictateur lui soit collée, ou ce qui revient
au même en bouffon « lider maxéimo ».. Le même travail
est opéré sur le reste du monde. Chavez est un « militaire
», « un dictateur en puissance » comme le disait Condoleezza
Rice, et il s’acoquine avec de « mauvaises fréquentations
». Et on égrène l’Iran, la Chine, la Russie…
Sur lesquels on se contente le plus souvent de répéter la vulgate.(1)
Ce qui est encore plus frappant est la manière dont
un Français de gauche, qui peut à la rigueur éprouver de
la sympathie pour Chavez, cédera aisément sur ce point là.
Sans jamais s’interroger sur ce qu' il représente lui-même
aux yeux de ces peuples agressés, avec quelles alliances il avance, les
Etats-Unis, Israêl, l’union Européenne, le japon. A partir
du moment où il sera dans l’opposition à son propre gouvernement
il ne mesurera même plus l’impuissance de cette opposition. Alors
même que les élections de 2007, telles qu' elles se préparent,
devraient lui montrer cette impuissance par rapport à ce que son pays
inflige au reste de l’humanité. Le jeu « démocratique
» qui laisse de moins en moins de place à une alternative réelle,
et qui donne de plus en plus le sentiment d’un théâtre de
mannequins, les blanchit encore de tout ce qui se commet en leur nom et leur
donne pouvoir de juger du reste du monde et d’accepter les discours de
haine, sous prétexte qu' il n’y a pas de fumée sans
feu.
C’est ce qui donne à nos propres positions ce
caractère creux, une sorte d’arrière salle de bistrot où
chacun sans mesurer l’urgence de l’heure développe une illusoire
maîtrise d’une réalité qui échappe, et dans
lequel ne peuvent que se multiplier les divisions… Face à cela,
un Chavez qui intervient à l’ONU pour dire que le monde ne peut
continuer ainsi, avec quelques maîtres fous qui prétendent en régir
les ressources, des ressources qui s’épuisent, des êtres
humains sacrifiés, quelques grandes puissances qui se sont arrogées
le droit de veto sur l’immense majorité de la planète. Des
grandes puissances qui pratiquent le pillage, le meurtre, une violence quotidienne
dont la guerre n’est que l’aboutissement logique, et qui sont nos
gouvernants. Chavez parle au nom de l’humanité, en défense
de l’humanité et explique que les choses ne peuvent pas poursuivre
ainsi, il défie le maître…
Et nous face à cette monstruosité à laquelle
nous participons au même titre que le citoyen des Etats-Unis nous croyons
encore avoir le droit de donner des leçons de démocratie. C’est
de cela peut-être qu' il faudrait prendre conscience. Et voir à
quel point ces multiples conditionnements sont en train de nous mener jusqu' à
l’acceptation du crime qui se développe partout, des êtres
qui ne peuvent plus vivre là où ils sont nés, et qui sont
condamnés à s’enfuir pour tenter de survivre. C’est
de cela dont il a été question au sommet des Non Alignés,
ou encore à l’Assemblée générale des nations
Unies. Sommes-nous encore capable d’entendre ce discours ? Nous participons
d’une fascisation de la planète et rien de ce que j’entends
de tous ceux qui prétendent aujourd’hui s’opposer ici même
à ce qui se fait n’est à la hauteur de ce qui se passe sur
cette planète et de l’autodestruction qui s’accomplit sous
nos yeux.
Honnêtement je ne sais plus à écouter tous
les discours des candidats, celui ou celle capable de s’opposer à
ce conditionnement des esprits, à avoir un peu de cette fermeté,
de cette dignité que l’on perçoit chez un Chavez, chez un
Evo Morales, chez un Fidel. Des dirigeants qui savent qu' ils jouent leur
vie, parce qu' ils savent qu' ils ne peuvent plus reculer, Marx le
notait déjà quand la réaction a eu peur la vengeance est
impitoyable, ils ont tous en tête le sort de Salvador Allende, les déstabilisations,
le terrorisme, les divisions, Evo Morales les affronte en ce moment même…
Croyez-vous réellement que le jour où ici même nous aurons
réellement choisi d’affronter leur ordre du monde, nous pourrons
espérer de la clémence, qu' on nous laissera jouer en paix
au jeu des chaises musicales du candidat le plus « rassembleur »
? Nous parlons de néo-libéralisme mais est-ce que nous mesurons
bien la violence réelle de ce système… Déjà
certains en vivent les échos assourdis, chômage, précarité,
destruction morale et physique…
Personne n’a la solution, mais ce qu' il faut mesurer
c’est la nature du mal auquel nous sommes confrontés.
Danielle Bleitrach
(1) ainsi j’apprends
qu' une revue comme Historia prépare un numéro sur le Che
Guevara, il doit être à charge, détruire cette image encombrante
du guérillero héroïque… Il ne faut plus laisser que
le « terroriste »…
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