LA CRéATION DE L’UNION ATLANTIQUE SE PRéCISE
Prologue
L’ÉCONOMIE UNIQUE TRANSATLANTIQUE
Dans un discours du 21 juin 2005, M. Günter Verheugen,
homme politique allemand membre du SPD (parti social-démocrate), mais
surtout vice-président de la Commission européenne en charge des
entreprises et de l’industrie, auprès de représentants de
l’industrie américaine, à Washington, déclara que
"les économies européennes et américaines continuent
de se développer ensemble, au lieu de s’éloigner l’une
de l’autre. Et nous contribuerons à l’amélioration
des conditions-cadre. Les économies européennes et américaines
fonctionnent déjà en grande partie comme une économie transatlantique
unique" (5).
En effet, nous avons dépassé le simple accord sur la libéralisation
du trafic aérien transatlantique entré en vigueur en 2008. Le
30 avril 2007, on apprenait la création d’un Conseil économique
transatlantique.
"Le Conseil économique transatlantique mis en place
lors du sommet de Washington, sera chargé de piloter un vaste chantier
visant à harmoniser les réglementations et les normes, de l’industrie
automobile ou pharmaceutique par exemple, de la propriété intellectuelle
ou des marchés publics, pour favoriser les investissements et les échanges
entre les Etats-Unis et l’Union européenne. Cette nouvelle institution,
dont le co-président européen sera le vice-président de
la Commission, Günter Verheugen, dirigera le travail pendant la période
entre les sommets annuels, en vue d’une meilleure intégration économique
entre les deux rives de l’Atlantique" (6).
Ce Conseil s’est réuni pour la première fois le 9 novembre
2008 à Washington (7).
Dans la résolution du Parlement européen du 8 mai 2008 sur le
Conseil économique transatlantique -PA_TA(2008)0192-, il est écrit
au paragraphe 2 : " le Parlement européen soutient résolument
le processus de renforcement de l’intégration économique
transatlantique, lancé lors du sommet de 2007 par l’adoption du
« cadre pour progresser dans l’intégration économique
transatlantique entre l’Union européenne et les Etats-Unis d’Amérique
» et par la création du CET, chargé de superviser et d’accélérer
les efforts exposés dans ledit cadre".
Je ne peux que vous invitez à lire la déclaration
croustillante de l’un des éléphanteaux du PS, M. Benoît
Hamon, du 7 mai 2008 en sachant que ce dernier est le vice-président
de la Délégation du Parlement européen pour les relations
avec les Etats-Unis. En avril 2006, la commission du commerce international
du Parlement européen a proposé la mise en place d’un «
marché transatlantique libre d’entraves » à l’horizon
2015 (8).
Le jeudi 1er juin 2006, le Parlement européen a adopté deux rapports,
préconisant la conclusion d’un accord de partenariat entre l’UE
et les Etats-Unis et la création d’un « marché transatlantique
libre d’entraves » à l’horizon 2015 (9).
Le Parlement européen souhaite en fait aller beaucoup plus loin.
L’ASSEMBLÉE TRANSATLANTIQUE
Dans le document (9), il est écrit que "sur le
chapitre institutionnel, ils - les députés - proposent que soit
conclu pour 2007 un accord de partenariat transatlantique, et réaffirment
« qu' il est nécessaire de renforcer la dimension parlementaire
de ce partenariat en transformant le Dialogue transatlantique des législateurs
(DTL) en une Assemblée transatlantique »". De plus toujours
dans le même document, il est précisé que "le rapport
d’initiative d’Elmar Brok (Allemand, membre du PPE-DE - Partie Populaire
Européen -, DE) souligne le « rôle important de l’OTAN,
l’un des principaux garants de la stabilité transatlantique et
de la sécurité » ".
OTAN : UNE INSTITUTION D’INTÉGRATION
Pour beaucoup de Citoyen(ne)s, l’OTAN est simplement
une alliance dont la seule vocation est la sécurité. Pas tout
à fait. L’article 2 du Traité de l’Atlantique Nord
stipule que les parties "s’efforceront d’éliminer toute
opposition dans leurs politiques économiques internationales et encourageront
la collaboration économique entre chacune d’entre elles ou entre
toutes". L’OTAN le cheval de Troie des hommes d’affaires américains…Sur
le site du Parlement européen, les Amis du Traité de Lisbonne
rappellent qu' en ce qui concerne la clause de « défense mutuelle
» au sein de l’Union européenne, "il est remarquable
que cette clause soit l’une des rares qui non seulement s’écarte
du texte initial de la Constitution, mais aille aussi plus loin que celle-ci".
Mais, "en pratique, l’OTAN demeure (pour les 21 États membres
de l’Union européenne qui en sont membres), à la fois «
le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise
en oeuvre » (Article 42 §7 du TUE) : son intervention serait prioritaire
si la sécurité d’un de ses États membres était
mise en cause". Et dire que le chef de l’Etat français, M.
Sarkozy, a fait ratifier par voie parlementaire le Traité de Lisbonne
et qu' il souhaite réintégrer la France dans l’OTAN.
Oh secours de Gaulle ! Il est vrai que Charles de Gaulle et Nicolas Sarkozy
n’ont pas les mêmes valeurs. Les valeurs de M. Sarkozy sont très
américaines.
LES VALEURS COMMUNES DE L’U.E. ET DES USA
Dans le document (10)
p.15, la Commission européenne rappelle qu' avec les U.S.A. nous
sommes "unis par des valeurs". Ultralibéralisme, inégalités
sociales, prison, société sous contrôle, …pardon je
dérape : démocratie, liberté, Droits de l’Homme en
particulier. Je vais surtout m’attarder sur les Droits de l’Homme.
Toujours p. 15, il est écrit : "Le principe des droits de l’homme
a d’abord été défini au niveau européen par
la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et
des libertés fondamentales adoptée en 1950 par le Conseil de l’Europe,
une organisation constituée de plus de 40 États membres. Il a
ensuite été développé dans la propre Charte des
droits fondamentaux de l’Union européenne proclamée en décembre
2000 à Nice. La Charte réunit pour la première fois tous
les droits personnels, civils, politiques, économiques et sociaux défendus
par l’Union européenne dans un texte unique. Elle ne se contente
pas seulement de redéfinir les droits de l’homme universels mais
aborde également des sujets d’actualité comme la bioéthique
et la protection des données personnelles". Cette redéfinition
des droits de l’Homme universels, quelle est-elle ?
L’introduction des notions de droits des minorités
et des groupes ethniques, conception allemande de la nation qui est totalement
différente de la conception française issue de la Révolution.
Un texte comme la Charte européenne des langues régionales et
minoritaires est une véritable régression comme le soulignait
l’ancien ministre et membre du Conseil d’Etat, M. Anicet Le Pors
(11). Un historien
français, M. Pierre Hillard, a fait un travail de recherche fondamental
sur l’arrière-plan politique de cette Charte : "La Grande
Europe ou le grand basculement ? ". (12)
L’Union atlantique ou le grand basculement…
CONCLUSION
David contre Goliath. De Gaulle contre Kennedy. Le 28 octobre
1966, lors d’une conférence de presse à l’Elysée,
De Gaulle –comme d’habitude- fut visionnaire. Il déclara
: "Ainsi certains, s’exaltant au rêve de l’Internationale,
voulaient-ils placer notre pays, comme eux-mêmes se plaçaient,
sous l’obédience de Moscou. Ainsi d’autres, invoquant, ou
bien le mythe supranational, ou bien le péril de l’Est, ou bien
l’intérêt que pourrait trouver l’Occident atlantique
à unifier son économie, ou bien encore l’utilité
grandiose d’un arbitrage universel, prétendaient-ils que la France
laissât sa politique se fondre dans une Europe fabriquée tout exprès,
sa défense dans l’O.T.A.N., sa conception monétaire dans
le Fonds de Washington, sa personnalité dans les Nations Unies, etc.
Certes, il est bon que de telles institutions existent et nous pouvons avoir
quelque intérêt à en faire partie, mais si nous avions écouté
les apôtres excessifs, ces organismes où prédominent –
tout le monde le sait – la protection politique, la force militaire, la
puissance économique, l’aide multiforme des États-Unis,
ces organismes n’auraient été pour nous qu' une couverture
pour notre soumission à l’hégémonie américaine.
Ainsi la France disparaîtrait, emportée par les
chimères" (13).
Ne répondait-il pas indirectement à la déclaration de Kennedy
du 4 juillet 1962 : "Nous ne regardons pas une Europe forte et unie comme
une rivale, mais comme une associée (…). Les Etats-Unis sont prêts
à souscrire à une déclaration d’interdépendance,
que nous sommes en mesure de discuter avec une Europe unie des voies et des
moyens de former une association atlantique concrète (…). En recommandant
l’adoption de la Constitution des Etats-Unis, Alexandre Hamilton disait
à ses amis new-yorkais de penser continentalement. Aujourd’hui,
les Américains doivent apprendre à penser intercontinentalement
(…). Car l’association atlantique dont je parle ne peut se tourner
seulement vers l’intérieur, se préoccuper de sa propre prospérité
et de ses propres progrès. Elle doit servir de noyau à l’union
finale de tous les hommes libres" (14).
Et pour cette union finale, qui sera à sa tête ?
ÉPILOGUE
En 2009, nous allons voter pour les élections européennes.
De nouveau, pour reprendre une expression de Pierre Mendès France, les
"mystiques européens" seront à l’œuvre. Le
grand cirque avec ses clowns et ses prestidigitateurs va recommencer. M. Bayrou
-qui est parfaitement au courant des événements- nous parlera
encore d’une Europe européenne. Le PS avec Mme Royal ou un(e) autre
nous ressortira l’éternel couplet sur l’Europe sociale, démocratique,
nous protégeant des délocalisations comme lors du dernier débat
présidentiel (voir vidéo, à 1min22s). M. Cohn-Bendit vociféra
contre l’Etat-nation, la République et fera comme d’habitude
l’amalgame avec le nationalisme. Les amis de M. Sarkozy vont nous préparer
quant à eux notre entrée dans le « nouveau monde ».
Cette gouvernance mondiale si chère à M. Attali qui, déjà
en 1999 dans un document consultable sur un site du gouvernement (« Europe
2020 : pour une Union plurielle ») , envisageait que : "« L’Union
atlantique » serait la constitution d’un ensemble euro-américain
par la mise en commun des compétences de l’U.E. et de celles de
l’OTAN. Ce scénario, le plus probable pour l’auteur, semble
réunir le plus grand consensus malgré son caractère invraisemblable
pour certains ". Une bonne crise financière et économique
provoquée par les puissants de ce monde pourrait enlever son caractère
invraisemblable pour certains…
Notes
(1) " Balladur, missionnaire
de l’« Union occidentale » ", article de Roman Bernard,
marianne2.fr, le 17/09/08.
(2) "Facs européennes et américaines veulent
renforcer leurs liens", article de Brigitte Perucca, journal Le Monde,
le 07/01/09.
(3) Rapport d’étude pour le ministère
des Affaires étrangères, analyse du processus de sélection
des Young Leaders français pour la période 1981-2005, French American
Foundation, Paris et New-York, 2006, p.4.
(4) Matrix I : réplique de Morphéus à
Néo. Source : http://sergecar.club.fr/cinema/matrix.htm
(5) Document de la Commission européenne datant de
juin 2006, "L’Union européenne et les Etats-Unis, des partenaires
mondiaux, des responsabilités mondiales", p.10.
(6) "Création d’un Conseil économique
transatlantique", article d’Elisa Drago, sur rfi.fr, le 30/04/07.
(7) "UE-USA : Réunion du Conseil économique
transatlantique" du journal leconomiste.com.
(8) idem que (6)
(9) "Les députés souhaitent renforcer le
partenariat transatlantique UE/Etats-Unis", Parlement européen,
Relations extérieures, le 01/06/06.
(10) idem que (5)
(11) "La Charte européenne des langues régionales
et minoritaires : une régression", par Anicet Le Pors
(12) Dans le document de M. Pierre Hillard, la carte de l’Europe
des régions de la Waffen SS n’est plus présente. Vous pourrez
la trouver sur le site du Comité Valmy.
(13) Dossier de Gaulle et l’Europe
(14) Source : La marche irrésistible
du nouvel ordre mondial, destination Babel, de Pierre Hillard, p.84, édition
François-Xavier de Guibert, Paris, 2007.
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