"Le dollar, monnaie mondiale" de Jean-Claude Delaunay
Editions Fondation Gabriel Péri, 22 rue Brey, 75017 Paris,
5 €.
"Le dollar, monnaie mondiale", de Jean-Claude
Delaunay, est un essai de description du rôle contemporain de la monnaie
des États-Unis, à la fois comme monnaie mondiale (la monnaie d'un
grand nombre d'agents économique, américains ou pas, opérant
en dehors des États-Unis) et comme système dollar (un ensemble
de relations économiques et financières extrêmement contraignantes,
ajoutant de nouveaux traits à ceux de l'impérialisme décrit
par Lénine). Ce petit livre présente une double ambition.
Une ambition descriptive et analytique, conduite à
partir de la littérature et des statistiques publiées par l'administration
américaine. Il en ressort que :
1) le dollar est bien monnaie mondiale. On peut, par exemple au Viêt Nam,
acheter des produits et les payer en dollars, bien que le dollar ne soit pas
la monnaie de ce pays et que le gouvernement des États-Unis n'ait aucun
contrôle sur la quantité des dollars qui y sont utilisés.
Cela dit, la nature mondiale du dollar prend appui sur des données financières
(bourses, actions et obligations, emprunts en euro-dollars) autrement puissantes
que celles que l'on vient d'évoquer de manière anecdotique.
2) l'alimentation du monde en dollars est effectuée par le biais du déficit
commercial américain. Cette évolution est visible depuis le début
des années 1970, au cours desquelles le lien existant entre le dollar
et l'or a été rompu.
3) cette alimentation engendre un déficit en augmentation en même
temps qu'une dette croissante de l'économie américaine à
l'égard du reste du monde.
Une ambition théorique. Montrer que :
1) derrière le système des échanges monétaires existe
une répartition géographique des productions et des échanges
(le capital marchandises).
2) ce système d'échanges nourrit un mouvement de mondialisation
des capitaux fixes et des actifs financiers. Les capitaux américains
s'expatrient et se combinent à des capitaux étrangers. Les capitaux
étrangers pénètrent les États-Unis et se combinent
à des capitaux américains.
3) le dollar US joue un rôle de premier plan dans la formation d'un "système
dollar", à la fois rigide, fragile et contraignant. D'une part,
le château de sable grandit, grandit… Il tient mais peut s'écrouler
à tout instant. D'autre part, la survie du château en question
impose une exploitation renforcée tant des travailleurs américains
(le déficit recouvre des délocalisations) que de celles et de
ceux des pays membres du système.
Ces analyses pourraient être, selon l'auteur, prolongées par les
4 remarques suivantes.
1) La théorie de Marx de la monnaie devrait sans doute être réfléchie,
si ce n'est déjà fait, au vu des évolutions contemporaines
du dollar.
2) L'analyse de l'impérialisme élaborée au début
du siècle (et déjà réévaluée au sein
de la théorie du CME) pourrait être enrichie de tous ces aspects
monétaires et financiers. Citant le travail de Henri Houben (cf. les
archives du site), J.C. Delaunay propose quelques approfondissements en ce sens.
3) Actuellement, le déséquilibre américain s'étend
et fait peser une menace sur l'économie mondiale. Ce système n'est
pas durablement viable. De manière immédiate, il contribue au
renforcement de l'exploitation des travailleurs. Mais on peut se demander si,
par exemple l'économie de la Chine ne devrait pas être assez rapidement
sortie de cette nasse.
4) Il paraîtrait donc très utile de réfléchir et
d'œuvrer pour la mise en place de systèmes monétaires et
financiers visant à remplacer le système dollar actuel. Il représente
une facette de l'impérialisme actuel, agissant en complément de
l'intervention militaire et idéologique de ses composantes, en particulier
des États-Unis, la plus puissante d'entre elles.
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