Emprisonné pour avoir dénoncé corruption et trafic d'armes en Irak

Grégoire Seither

L'un(e) après l'autre, les hommes et femmes au sein de l'Armée US en Irak qui ont osé dénoncer la corruption et les malversations qui émaillent la reconstruction de l'Irak ont été calomniés, réprimandés, mis à la porte, dégradés... ou pire encore.

[MSBNC 29/08/07 - IES News Service]

Intendant de la Marine US, stationné en Irak, Donald Vance avait mis à jour un trafic d'armes dans son unité. Il l'avait dénoncé aux autorités... qui s'étaient empressés de le jeter en prison et de le soumettre à la torture pour avoir "sali l'Armée".

"Certains jours, quand je me roulais en boule sur le sol de béton froid de ma cellule solitaire, avec la musique violente qui me tombait dessus nuit et jour et mes "camarades soldats" qui m'hurlaient dans les oreilles et me donnaient des coups de pieds... je me disais que j'aurais mieux fait de fermer ma gueule et oublier mes valeurs d'honnêteté et de bonne gestion."

Il pensait faire son métier d'intendant quand il avait dénoncé, d'abord à sa hiérarchie, puis, ne voyant rien changer, au FBI les trafics de fusils mitrailleurs, de mines anti-char et de mortiers qui se déroulaient sous ses yeux. "Les armes étaient vendues contre du cash, sans aucun reçu, ouvertement. Des gens venaient se servir comme au supermarché, il y avait des insurgés irakiens, mais aussi des soldats américains, des agents du Département d'Etat ainsi que des employés irakiens de l'ambassade et des employés des ministères. Certains venaient s'équiper pour leur protection personnelle, d'autres venaient acheter un souvenir, d'autres pensaient faire du profit en revendant les armes au marché noir, tant en Irak qu'aux Etats-unis... enfin il y avait carrément des unités terroristes qui venaient faire leur marché dans nos stocks. . .

Vance en avait parlé à ses supérieurs qui lui avaient répondu qu'ils s'en occuperaient. Ne voyant rien venir, ne sachant pas vers qui se tourner en Irak, Donald Vance avait commencé à prendre des photos, à noter les allées et venues et à photocopier des documents. Profitant d'une permission à Chicago, il était allé voir le bureau local du FBI et avait tout déballé. "A mon retour en Irak, ils m'attendaient à l'aéroport. On m'a embarqué pour 97 à Camp Cropper, une ancienne prison militaire en dehors de Bagdad qui avait hébergé Saddam Hussein. Personne, pas même ma famille ne savait où j'étais, on m'avait classé dans la catégorie des détenus particulièrement dangereux."

Dans une cellule voisine se trouvait le collègue de Vance, Nathan Ertel, qui avait participé à l'enquête, rassemblant des documents. après plusieurs mois de détention solitaire et de tortures physiques et mentales, les deux furent libérés et renvoyés de l'armée. Rentrés à Chicago, Vance et Ertel ont déposé plainte contre l'Armée pour emprisonnement illégal ainsi que torture. "On a appliqué sur nous les tactiques d'interrogation physiques et mentales qui sont habituellement employées contre les terroristes et les combattants ennemis. Alors que nous étions des membres de l'Armée US, des citoyens américains qui oeuvraient pour le bien de leur pays et dénonçaient des actions illégales et criminelles."

Contrairement à ce que veulent nous faire croire les films d'Hollywood, il y a rarement de "Happy End" pour ceux qui osent dénoncer des irrégularités ou des crimes au sein de leur entreprise ou organisation. Au contraire, le système fait tout pour décourager l'honnêteté et l'enquête, frappant lourdement ceux qui osent dénoncer ou témoigner.

Une étude menée par l'Associated Press en 2006 montre que, ces 30 dernières années, la quasi totalité de ceux qui ont "tiré l'alarme" (whistleblowers) s'est retrouvé harcelée, menacée, a souffert dans sa vie professionnelle et familiale ou est tout simplement mort pour avoir ouvert la bouche.

"Si vous osez dénoncer, vous serez détruit," explique William Weaver, professeur en Sciences Politiques à l'Université du Texas-El Paso et conseiller juridique senior de la coalition des "Whistleblowers" dans le domaine de la sécurité nationale (National Security Whistleblowers Coalition).

La suite (en anglais) sur : http://www.msnbc.msn.com/id/20430153/

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