Pour contrer les caricatures occidentales sur la Chine

Dictature brutale d’un parti monolithique, pays nationaliste voire xénophobe, régime qui surexploite sa main d’oeuvre sous-payée. Toujours les mêmes clichés circulent à propos de la Chine depuis dix ans. A l’approche des Jeux-Olympiques toutefois quelques sons de cloches différents se font entendre qui révèlent une réalité plus complexe.

Sur le traitement de la main d’œuvre un chroniqueur déclare « J’ai visité en Chine des usines où les ouvrier(e)s travaillaient pour 90 à 100 € par mois, dans de bonnes conditions de travail. C’est un bon salaire là-bas. Mais dans une grosse boîte de la sidérurgie, c’était 600 €, ce qui est un très bon salaire. Mais ça reste toujours inférieur aux nôtres, en chiffres absolus. Certaines catégories sont (ou étaient) certainement sous-payées. Mais les choses changent. De nouvelles lois sur le travail (contrats, salaires, etc.). font que les entreprises peuvent de moins en moins faire ce qu' elles veulent. La présence de l’ACFTU (syndicat officiel) pèse, malgré toutes les critiques adressées à son égard par les médias occidentaux. » (Marc van Campen http://romaindecourcelles.spaces.live.com/blog/cns!AF336575BD9B73BE!1269.entry). Le même chroniqueur note qu' une des preuves de la progression des salaires se trouve le fait que le numéro deux mondial des équipements sportifs, l’allemand Adidas, va transférer une partie de sa production car il juge le niveau des salaires en Chine dorénavant trop élevé. Le revenu par habitant a été multiplié par cinq ! Il était, d’ après la Banque mondiale, de 190 dollars l’an en 1978, il est de 1000 dollars environ en 2004. Cela a permis à 400 millions de Chinois de sortir de l’extrême pauvreté-moins d’un dollar par jour. Réservés à l’élite pendant un temps, le réfrigérateur, le vélo et le téléphone sont devenus des biens de consommation courante pour des centaines de millions de personnes. En termes de « parité de pouvoir d’achat », la Banque mondiale estime à 4000 dollars le PIB par habitant, dix fois moins « seulement» que celui des Etats-Unis.» (Erik Izraelewicz Quand la Chine change le monde, Paris, Grasset, 2005).

Les ouvriers et paysans chinois continuent à défendre des avantages issus du système socialiste face à la logique de la globalisation néo-libérale. Les statistiques des “incidents de masse, manifestations ou révoltes” sont passées de 10 000 en 1994 à 58 000 en 2003 et 74 000 en 2004 (New York Times, 24.8.2005) ce qui est le signe du dynamisme de la société. Un article de la Monthly Review de 2006 (http://www.monthlyreview.org/0606weil.htm) expliquait qu' à la différence de ce qui s’est passé en Europe de l’Est, l’expérience qu' ont beaucoup de travailleurs chinois dans le cadre des anciennes organisations socialistes les aide à résister aux excès du capitalisme et à s’organiser notamment contre la corruption. Dans des villes berceau de la révolution chinoise comme Zhengzhou, même si le degré de participation des travailleurs dans la gestion des usines d’Etat restait limité, ceux-ci gardent le sentiment qu' elles leur appartiennent. L’efficacité de l’organisation ouvrière se réflète dans certains conflits comme celui de l’usine d’équipement de transmission électrique de Zhengzhou en 2001 où la police paya des paysans pour enlever les équipements de l’usine pour faire échouer soulèvement ouvrier contre la privatisation. Le fait que la police ne puisse elle-même faire le travail était le signe de la mobilisation contre elle. Et, même quand les paysans intervinrent,le 24 juillet 2001, 40 000 ouvriers de toutes les usines alentour se liguèrent contre eux en une bataille rangée, et la privatisation échoua. Les mouvements sont menés pour la conservation des « lois de Mao » et la statue de Mao est devenue dans cette ville le point de ralliement de manifestations (interdites) des étudiants de gauche. Le renouveau de la gauche, qu' il soit d’inspiration maoïste ou pas se manifeste dans des pétitions comme celle du Zhengzhou 4 ou la lettre d’anciens membres du PC, militaires et intectuels d’octobre 2004 à Hun Jitao, intitulée « Nos vues et opinions sur le paysage politique actuel ». Malgré la dissolution des communes populaires 1 % des villages ont gardé des structures collectivistes et un renouveau des coopératives a été constaté. L’héritage de la révolution culturelle commence à être réévalué dans les milieux intellectuels où l’on parle de plus en plus « d’apprendre des masses », et, le congrès du PC chinois fut l’occasion d’un débat sans précédent sur le socialisme. Sur le néo-maoïsme en Chine aujourd’hui on peut aussi lire «Renouveau Maoïste et Aspirations Démocratiques » (http://thirdworldforum.net, http://alternatives-international.net/article2346.html) publié le 31 juillet 2008.

Cette situation est de nature à favoriser un réancrage à gauche de certains secteurs du PC chinois lequel n'a pas officiellement renoncé à l’objectif socialiste, dans son discours ni même dans certaines de ses pratiques en témoigne l’article « Li Qiqing: La modernisation du système financier et bancaire en Chine » sur le contrôle des banques dans ce pays (http://socio13.wordpress.com/2008/08/02/li-qiqing-la-modernisation-du-systeme-financier-et-bancaire-en-chine/).

Pour ce qui est du « nationalisme » chinois, et qui doit plutôt être analysé comme un réflexe anti-impérialiste d’une nation humiliée par le colonialisme occidental pendant plusieurs générations (et qui l’est encore bien souvent), on peut se reporter à l’article de Jean-Louis Rocca « Des Chinois contre la mondialisation » dans Critiques internationales 2002- 2 (no 15)| ISSN 1290-7839 | ISSN numérique : en cours | ISBN : 2-7246-2941-8 | page 70 à 74

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