L'ÉDITION PEUT ÊTRE UNE ARME POLITIQUE A PROPOS D'UN PETIT LIVRE, ET D'UNE UNE GRANDE EXPÉRIENCE DE LUTTE

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publié le : 1er février 2021

le monde actuel des Editeurs français fut durant deux siècles un support de la liberté de penser et d'écrire dans notre pays et un exemple pour le monde. Il a été submergé peu à peu par le Capitalisme, et est consacré essentiellement aujourdhui à rapporter des bénéfices aux actionnaires, et soumis donc à leurs désirs de publier ce qui se vend. A l'issue de grands coups de publicités accrocheuses, l'étalage des libraires et des super-marchés est envahi de centaines de titres au contenu médiocre, dont on sait par avance qu'ils auront les quelques dizaines d'acheteurs qui couvrent le coût d'impression, peu élevé.. Les seuls ouvrages choisis par l'éditeur pour devenir des best-sellers ont au départ bénéficié d'un lancement fort onéreux, un investissement qui peut être plus que "rentable".

Dans ce système éditorial qui multiplie les imprimés, mais sur des critères souvent éloignés de la qualité intellectuelle ( quel grand editeur publierait Montaigne aujourd'hui ? ), les ouvrages, d'inspiration marxiste ou simplement progressiste et rationaliste, nombreux il y a quarante ans en France, par le biais d'éditeurs comme les Editions Sociales, Messidor, etc, sont quasiment absents de la production actuelle. Ce passé n'était certes pas un Age d'or, mais la censure politique cachée est plus drastique encore aujourdhui, en silence, et par la loi du fric. Seules subsistent quelques maisons d'éditions plutôt artisanales ( Delga, Éditions critiques, etc), grâce au militantisme des animateurs, et souvent à l'aide financière de sponsors, Pas toujours désintéressée comme l'a démontré l'OPA récente des "porteurs de parts majoritaires" sur le Temps des Cerises...

Dans cette mouvance fragile, revendiquant fièrement leur role militant, leur inspiration marxiste, les Éditions Terrasses, viennent de publier sous le titre " le capitalisme, c'est la guerre", une analyse-temoignage du militant-editeur Nils Andersson, dont les etats de service dans le domaine de l'anti-impérialisme forcent le respect. C'est par exemple lui, jeune editeur francophone en Suisse durant la Guerre coloniale d'Algerie, qui permit l'impression et la diffusion clandestine du temoignage d'Henri Alleg ( la Question ) incarcéré et torturé par les parachutistes français à Alger. Je me souviens d'avoir diffusé clandestinement a l'Université ce petit ouvrage broché, apres l'interdiction par le gouvernement de ces dénonçiations de la torture et du colonialisme (" la Question" et " la Gangrène " ). Contraint à l'exil durant de longues années ( de l'Albanie à la Suède ), Nils vit aujourdhui en France, toujours militant marxiste, étranger à toutes les concessions opportunistes qui ont fleuri depuis l'effondrement du " Socialisme réel " en Europe et ailleurs.

Dans son texte d'environ 140 pages nourries de faits, il raconte et explique, chronologiquement, la vingtaine de guerres qui ont ensanglanté notre monde depuis 1990, de l'Irak à la Yougoslavie, du Rwanda à la Syrie, etc, avec toujours en arrière plan les menées de l'Imperialisme contre les peuples, pillés, dominés, et détournés des luttes libératrices par les racismes, les fanatismes religieux et les xénophobies nationalistes. Une éclairante leçon d'histoire que tout citoyen amoureux de la paix et d'égalité sociale devrait avoir sous la main pour mieux comprendre les convulsions qui agitent le monde.

francis arzalier

NILS ANDERSSON. LE CAPITALISME, C'EST LA GUERRE. EDITIONS TERRASSES terrasses.net 11,5 euros