compte-rendu de la réunion du collectif communiste
Polex
( 8 décembre 2015)
De passage à Paris, notre camarade Aron Cohen,
de Grenade, a présenté à notre collectif quelques réflexions sur
la situation politique en Espagne, où des élections générales ont
lieu le 20 décembre prochain. Les résultats des élections régionales
en France et des législatives au Venezuela ne pourront avoir que
de fâcheuses conséquences sur l'expression de forces communistes
divisées et affaiblies.
Aron nous a rappelé les principales étapes de l'évolution
du mouvement communiste espagnol depuis la mort de Franco (1975).
après avoir été le combattant le plus résolu de l'antifranquisme,
le PCE légalisé en 1977 - en pleine période « eurocommuniste » et
sous la direction de Santiago Carrillo, a soutenu une « transition
» monarchiste qui renonçait au nettoyage de l'appareil d'état franquiste.
Avec Julio Anguita, il poursuivait une dérive qui l'éloignait des
positions de classe, pour abandonner peu à peu son identité communiste
au sein d'Izquierda Unida (I.U., la gauche unie espagnole, créée
en 1986).
Des oppositions à l'orientation de plus en plus
opportuniste se sont exprimées : un PC. (« PC punto ») créé en 1984
est devenu en 86 le PCPE (PC des peuples d'Espagne) avec Ignacio
Gallego comme secrétaire général. Les tentatives de faire du PCPE
un véritable parti communiste se sont brisées sur le refus de Gallego,
qui ne souffrait aucune contradiction, et avait par exemple abandonné
le mot d'ordre de « réforme agraire » pour une forme édulcorée en
« réforme agraire intégrale », noyant ainsi la question centrale
de la propriété. Cofondateurs d'Izquierda Unida, Gallego et ses
proches faisaient dès 1988 retour au PCE.
Durant les années 90, le PCE a affirmé la nécessité
de devenir une « formation plus large » : le Congrès de 1995 a consacré
la fin du PCE comme parti organisé, et son orientation vers un «
pacte social » de type social-démocrate. Le PCE s'est effondré,
de nombreux militants ouvriers s'en éloignant durablement, quand
d'autres rejoignaient le Parti socialiste (PSOE). Durant les années
2000, la privatisation des caisses d'épargne a nourri plusieurs
cas de corruption touchant notamment des responsables politiques
et syndicaux (dont des représentants des Commissions Ouvrières -
CCOO - très liées à I.U.).
Au printemps 2014, la situation de l'Espagne est
dramatique : coupes budgétaires, augmentation du chômage, multiplication
des contrats de travail au rabais, reprise de l'émigration des jeunes
espagnols vers l'étranger. L'apparition et la montée des Indignés
et de Podemos témoignent dans un premier temps d'une réelle volonté
de résistance, et I.U.gagne 3 élus aux Européennes au sein de la
coalition passagère 'gauche plurielle' (10 % des voix et 7 élus).
De son côté Podemos recueille près de 8 % des
suffrages, sur une ligne 'ni droite ni gauche', et des adhésions
internet (par simple inscription sur un site) regroupant les citoyens
au delà des classes et sans références aux conflits capital/travail.
Dirigé par Pablo Iglesias (universitaire, politiste né en 1978,
passé par la Jeunesse communiste) Podemos soigne sa « com » en direction
des couches moyennes, en se distinguant soigneuse-ment des communistes,
trop marqués sans doute par leur passé de luttes contre Franco.
Podemos est silencieux sur l'Europe, l'Euro, l'OTAN. Il s'est cependant
positionné récemment contre une intervention militaire au Moyen-Orient
au sein d'une coalition anti-guerre.
En dés-idéologisant le combat politique, Podemos
a accéléré la dégénérescence du PCE, que ses nouveaux statuts enferment
dans une sorte de « contrat de sous-location » avec IU, en consacrant
l'abandon de « la forme parti ». Les divisions persistent au sein
même de ceux qui restent, aussi bien de la part de membres honnêtes
que de partisans de la ligne liquidatrice adoptée durant la transition.
Mais beaucoup l'ont quitté : des communistes frustrés existent en
nombre, sans toutefois entraîner une réaction d'ensemble. De petites
lumières s'allument pourtant de temps à autre, ainsi la déclaration
récente du Comité de Parti de Grenade (texte joint).
Le débat a permis de noter à quel point des similitudes
existaient entre la situation espagnole et française. A une question
sur l'absence d'un parti d'extrême droite proprement dit en Espagne,
Aron a répondu que toutes les droites se retrouvent au sein du Parti
Populaire PPE, des droites libérales à la droite franquiste la plus
extrême. La mise en avant par le PPE des thèmes d'extrême droite
(reposant sur les « inconscients de classe » de toute nature et
de vieux réflexes historiques anti-arabes et anti-musulmans) est
une hypothèse qu'on ne peut écarter, d'autant que la « transition
post-franquiste » n'a pas produit les anticorps nécessaires pour
une résistance populaire à de telles campagnes.
NB Début décembre 2015, les sondages donnaient
de 4 à 5% pour IU, 10 à 12 % pour Podemos.
Résultats des élections législatives du 20 décembre
:
Motion approuvée le 26
novembre 2015 par l’organisation locale de la ville de Grenade du
Parti communiste d'Espagne (PCE)
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