Le coltan, source d’instabilité politique en Afrique
Centrale
Danielle Lefeuvre-Lavaud
Les richesses du sous-sol de beaucoup de pays africains excitent
des convoitises qui conduisent fréquemment à leur instabilité
politique. La découverte de champs pétrolifères est le
plus souvent à l’origine de troubles, de rébellions contre
les pouvoirs en place. Comme par hasard, des armes circulent, des bandes armées
se forment. Sous prétexte de changer la donne politique dans les Etats
dont les gouvernants sont suspectés, souvent à raison, il faut
le dire, de profiter de la manne pétrolière pour s’enrichir
personnellement, apparaît une opposition soi-disant démocratique
appuyée par des factions armées. Mais le pétrole n’est
pas seul en cause. Bien qu' on en parle moins, les richesses minières
provoquent des effets comparables. Ainsi, les mines de diamant ont joué
un rôle important dans le financement des guerres civiles au Libéria
et en Sierra Leone. On connaît moins le rôle tenu par le coltan
dans l’instabilité politique de la République Démocratique
du Congo.
qu' est-ce que le coltan ? A quoi sert-il ?
où le trouve-t-on ?
Le coltan est un minerai composite radioactif. Il contient
à la fois de la colombite et du tantale, d’où son nom, mais
il contient également du plomb, du niobium, de l’uranium 238 et
du thorium 232. Parmi ses composants, le tantale est très apprécié
de certains industriels spécialisés. En effet, il entre désormais
dans la fabrication des condensateurs, des microprocesseurs dont on sait l’actuel
développement. Il est l’un des éléments qui permettent
la miniaturisation de beaucoup d’appareils électroniques car il
présente deux caractéristiques physiques importantes, un taux
de fusion élevé et une forte densité énergétique
qui permettent de réguler la tension et de conserver l’énergie
électrique, dans des volumes réduits. C’est ainsi qu' il
y a du tantale dans les ordinateurs et les téléphones portables.
Mais le tantale intervient aussi dans la production d’aciers spéciaux
qui doivent faire preuve d’une grande résistance à la chaleur,
ceux utilisés dans les réacteurs des avions, par exemple.
C’est pourquoi le coltan qui n’était auparavant
qu' un sous-produit de l’exploitation de l’étain est
devenu un minerai très recherché. Son prix au kilo est parfois
monté à plus de 500 $, au cours des années récente.
Il a augmenté de 2000% en cinquante ans De ce fait, les négociants
ne sont pas toujours très regardants sur les conditions d’exploitation
et de première commercialisation de ce minerai ; ce qui compte pour
eux, c’est de s’en procurer au moindre coût, pour le revendre
sur le marché et faire le maximum de profit. Les réserves actuellement
répertoriées se trouvent pour l’essentiel en Australie (en
Nouvelle Angleterre), au Canada, au Brésil, en Chine et en République
Démocratique du Congo. Officiellement, l’Australie assure actuellement
officiellement 80% de la production mondiale mais les initiés estiment
ce chiffre surévalué, d’autant que la R.D.C recèlerait
80% des réserves mondiales.
Le Coltan, un enjeu pour la paix et le développement
de la République Démocratique du Congo.
Cette richesse en coltan de la RDC excite les convoitises
des pays voisins. On a pu dire que le Burundi, l’Ouganda et le Ruanda,
à la faveur des troubles qui ont traversé et traversent encore
le pays, ont mis et mettent encore sur le marché des tonnes de coltan
extraites du sous-sol de la RDC, alors qu' ils n’en extraient pas
eux-mêmes de leur sous-sol. Un rapport officiel de l’ONU a accusé
ces pays d’exploiter les ressources naturelles de la RDC pour y financer
la guerre et ainsi continuer leur commerce fructueux dont les profits ne vont
ni dans la poche des Congolais, ni dans celle de l’ensemble de leurs ressortissants,
mais seulement dans celle de quelques uns. Des petits exploitants locaux, risquant
la contamination radioactive et polluant les cours d’eau à la manière
des orpailleurs, peuvent ainsi extraire quelques kilos de coltan par semaine,
qu' ils revendent à vil prix à des intermédiaires
douteux. Pour ces petits exploitants, des anciens paysans pour la plupart, ce
gagne pain est essentiel à leur survie et à celle de leur famille.
Bien peu d’utilisateurs savent tout cela quand
ils branchent leur ordinateur, utilisent leur play-station ou mettent à
l’oreille leur téléphone portable. Les conditions d’exploitation
ne devraient-elles pas être sécurisées pour les hommes qui
extraient ce minerai et les bénéfices ne devraient-ils pas revenir
à l’ensemble des habitants de la RDC ?
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